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Méditation : Vigilance, Jésus revient bientôt

Une nouvelle année commence : l’occasion de lever les yeux, de nous mettre en chemin vers le Seigneur, de sortir de nous-mêmes. Ou plutôt : de l’accueillir, car c’est lui qui daigne venir nous chercher. Lorsque l’on sonne à notre porte, nous ne faisons que quelques pas pour ouvrir ; or, parfois, il s’agit d’un voyageur qui vient de très loin… Le Seigneur de même va parcourir l’essentiel de la distance nous séparant du Ciel, et notre bref parcours d’Avent ne consistera qu’à ouvrir la porte de notre cœur pour l’accueillir et nous réjouir avec lui. Dans une homélie, le cardinal Ratzinger décrivait ainsi notre temps liturgique :

« L’Avent est le fait d’attendre le Christ avec la plus grande vigilance. Il signifie courir à sa rencontre avec un cœur vigilant. Il est donc avant tout vigilance, éveil du sommeil qui nous maintient dans l’apparence et dans l’illusion. S’apercevoir que lui, caché, est déjà présent au milieu de nous. L’Avent est urgence. Il signifie que notre vie a reçu un devoir, un devoir urgent qui l’absorbe entièrement, pour lequel chaque instant est important. À l’inverse de l’agitation vécue par de nombreuses personnes – qui n’est souvent que le désir d’oublier l’insignifiance de ce que l’on fait, le sentiment d’inutilité – fait ici irruption l’authentique urgence de ce que notre vie, de ce que le monde demande. »J. Ratzinger, Enseigner et apprendre l’amour de Dieu, Parole et silence, 2016, p. 144.

Relever la tête

« Redressez-vous et relevez la tête » (Lc 21, 28) : l’exhortation de Jésus dans l’évangile nous interpelle au début de cette période de l’Avent. La forêt de nos soucis et préoccupations quotidiennes nous enserre dans la grisaille et l’immédiateté : voici une clairière qui s’ouvre enfin, la nouvelle année liturgique avec ses splendeurs spirituelles, qui nous invite à passer de la tiédeur du naturel à la splendeur du surnaturel. Pour cela, il faut lever les yeux vers le Seigneur. C’est d’ailleurs la première prière que la liturgie mette sur nos lèvres dans l’ouverture de la messe : « Vers toi, Seigneur, j’élève mon âme. Mon Dieu, je compte sur toi. » (Ps 25, 1 : antienne d’ouverture)

Concrètement, nous sommes invités à redécouvrir, au-delà des apparences, la présence de Dieu dans nos vies et dans le monde autour de nous : création toujours renouvelée dans sa splendeur, événements importants qui tissent la trame de l’histoire, liens familiaux et amicaux, grâces reçues… Nos proches et tous ceux que nous rencontrons sont beaucoup plus que ce qui paraît à première vue. Par eux, Dieu nous parle et il veut leur parler par nous. L’histoire de nos vies et du monde a une valeur qui surpasse l’apparente succession d’événements chaotiques ; notre horizon est infiniment plus étendu que nos soucis quotidiens. Nous attachons-nous à décrypter ces événements et à y déceler la présence et le plan de Dieu ? Y a-t-il dans nos vies, chaque jour, de la place pour accueillir l’imprévu et l’inconnu ? Saint Claude La Colombière nous fait part d’une grâce qu’il a reçue dans la méditation et que nous pouvons demander au Seigneur :

« Dieu m’a fait pénétrer, ce me semble, et voir clairement cette vérité : premièrement, qu’il est dans toutes les créatures ; secondement, qu’il est tout ce qu’il y a de bon en elles ; troisièmement, qu’il nous fait tout le bien que nous recevons d’elles. Et il m’a semblé de voir ce roi de gloire et de majesté appliqué à nous échauffer en nos habits, à nous rafraîchir en l’air, à nous nourrir dans les viandes [aliments], à nous réjouir dans les sons et dans les objets agréables, à produire en moi tous les mouvements nécessaires pour vivre et pour agir. Quelle merveille ! Qui suis-je, ô mon Dieu, pour être ainsi servi par vous, en tout temps, avec tant d’assiduité et en toutes choses avec tant de soin et d’amour ! »Saint Claude La Colombière, Écrits spirituels, DDB, 1982, p. 125.

L’oracle de Jérémie (première lecture), qui répète à plusieurs reprises l’expression « en ces jours-là », nourrit notre espérance : l’Avent nous introduit dans le temps de l’accomplissement des promesses. Le Dieu fidèle à son Alliance tiendra sa Parole, il « accomplira la parole de bonheur » pour son Peuple. Cette expression générique désigne le don de la vie en plénitude, une promesse qui s’est déjà réalisée avec l’Incarnation du Fils, et dont l’accomplissement total se déploie dans l’histoire. Par sa venue sur la terre, Jésus a inauguré une nouvelle période du Salut : « Paix sur la terre aux hommes qu’il aime », chantent les anges à sa naissance (Lc 2, 14). Par sa venue chaque jour dans l’Église, il nourrit son Peuple et l’engendre à la vie de l’Esprit. Lors de son avènement à la fin des temps, il portera cette vie à son achèvement et la simple « promesse de bonheur » s’élargira au don de la Gloire sans fin dans le Ciel. L’espérance vient nous habiter, comme le pape François nous le rappelait :

« L’horizon de l’espérance ! C’est l’horizon pour faire une bonne marche. Le temps de l’Avent, que nous commençons aujourd’hui à nouveau, nous redonne l’horizon de l’espérance, une espérance qui ne déçoit pas parce qu’elle est fondée sur la Parole de Dieu. Une espérance qui ne déçoit pas, simplement parce que le Seigneur ne déçoit jamais ! Lui est fidèle ! Il ne déçoit pas ! Pensons et sentons cette beauté. »Pape François, Angélus, 1er décembre 2013.

Nous proclamons aujourd’hui l’évangile du discours eschatologique : la liturgie l’a choisi pour nous maintenir dans une saine tension et nous faire attendre le retour de celui qui est notre espérance. Mais comment vivons-nous cela dans le concret de nos existences ? Notre espérance est-elle surtout humaine, matérielle, se confondant avec les espoirs humains de notre société ? Ou bien vibrons-nous pour un autre horizon, le Royaume qui vient ? Face aux souffrances et aux imperfections de ce monde, désirons-nous le Royaume qui vient et œuvrons-nous pour qu’il advienne, en suppliant le Seigneur comme les premiers chrétiens : « Maranatha, viens, Seigneur Jésus ! » ? Ou bien ce monde, finalement, nous convient-il assez bien par ses satisfactions et commodités passagères ? Trois attitudes nous permettront de vivre l’Avent fructueusement : vigilance, charité et contemplation.

Vigilance dans l’attente

Jésus, dans l’évangile de ce jour, tient des propos énergiques qui viennent nous interpeller vivement : la description des événements dramatiques de « la fin des temps » est effrayante et, souvent, les prédicateurs, saisis par une gêne compréhensible, n’osent pas l’expliquer, préférant tourner la page et revenir au Jésus confortable des miracles et paraboles…

Ne nous attardons pas trop sur les bouleversements cosmiques qui sont mentionnés : le Christ ne cherche pas à nous donner des indications concrètes, mais veut nous avertir que toute la création vivra un changement et une fin grandioses. Nous sommes déjà témoins, comme à chaque époque, de tant d’événements paradoxaux : catastrophes, guerres, épidémies, scandales… Il nous semble parfois entendre près de nous « le fracas de la mer et des flots » (Lc 21, 25). De fait, au long de notre vie spirituelle, tous les fondements humains s’effondrent les uns après les autres, pour que n’apparaisse et ne reste que le vrai fondement de notre espérance, le Seigneur. Toutes les sécurités humaines nous sont enlevées : par exemple, les récents scandales liés aux abus dans l’Église nous ont fait découvrir avec stupeur l’étendue du mal chez certains membres du clergé. La figure sacerdotale, et notre confiance tranquille en l’institution, ont été ébranlées. Le Seigneur nous avait prévenus : « Sur terre, les nations seront affolées et désemparées… » (v. 25) Ce sont des occasions de purification de notre foi, pour que nous restions bien campés sur les fondements stables de la Parole divine et de la sainteté essentielle de l’Église.

Le mal ne vaincra pas : le Jugement dernier marquera la fin de l’histoire pour une purification définitive. Jésus l’a déjà mentionné dans différentes paraboles, celle des mines, par exemple : « Une fois de retour, il fit appeler ces serviteurs auxquels il avait remis l’argent, pour savoir ce que chacun lui avait fait produire. » (Lc 19, 15) La fin des temps sera terrible pour les hommes qui auront placé tous leurs espoirs dans ce monde qui passe : « Les hommes mourront de peur dans la crainte des malheurs arrivant sur le monde » (Lc 21, 26) ; mais, pour les croyants et les hommes de bonne volonté, ceux qui attendent un autre monde et qui y travaillent déjà, ce retour sera un jour de joie et une libération, le Jour de Dieu, le jour de l’accomplissement de la promesse.

Nous savons tout cela, mais l’attente peut paraître longue et le temps peut émousser la vigueur de notre espérance. Le cœur fatigué par l’attente suit facilement la tendance à chercher ailleurs d’autres consolations illusoires. Origène commente bien l’avertissement très clair de Jésus :

« En outre, le Sauveur même, par son autorité de Seigneur et de Roi, fixant règles et lois pour les prêtres en même temps que pour les peuples, déclare : “Prenez garde que vos cœurs ne s’appesantissent dans l’ivresse et l’orgie, et dans les soucis du siècle, et que la mort ne fonde sur vous à l’improviste.” Vous avez entendu la proclamation du roi éternel, vous avez appris la déplorable fin de l’ivresse et de l’orgie. Qu’un médecin habile et sage vous donne des prescriptions identiques, disant par exemple : Prenez garde que personne ne prenne avec excès du suc de telle ou telle herbe, le faire provoquerait la mort subite. Je ne doute pas que chacun pour son salut obéirait à la mise en garde du médecin. Or, voici que le médecin des âmes et des corps en même temps que le Seigneur ordonne de se garder de l’herbe de l’ivresse et de l’orgie, et pareillement des soucis du siècle comme de sucs mortels à éviter. »Origène, Homélie sur le Lévitique, VII, 5-6, coll. « Sources Chrétiennes », n° 286, Cerf, 1981, p. 302-303.

L’avertissement de Jésus est plus actuel que jamais : nous sommes toujours tentés par les ivresses habituelles, celles du pouvoir, du plaisir et de l’argent, qui continuent à faire des ravages. Mais de nouvelles dépendances ont vu le jour, comme la drogue ou Internet. Laïcs ou religieux, hommes ou femmes, jeunes ou moins jeunes, l’ordinateur fait irruption dans notre intimité pour nous proposer ces ivresses faciles qui détruisent en quelques instants l’œuvre vertueuse de plusieurs années : pornographie, violence, jeux de hasard, échange fébrile d’informations malveillantes et malsaines, consommation compulsive, isolement progressif du reste du monde… L’appel de Jésus nous rejoint : « Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse dans les beuveries. » (Lc 21, 34) L’Avent est un temps très propice pour réduire avec décision notre présence dans tant de lieux superficiels et dangereux. Écoutons donc ce Médecin de l’âme et ce futur Juge ! La liturgie nous invite à demander humblement ce qui nous convient pour cette période :

« Donne à tes fidèles, Dieu tout-puissant, d’aller avec courage sur les chemins de la justice à la rencontre du Seigneur, pour qu’ils soient appelés, lors du jugement, à entrer en possession du royaume des cieux. Par Jésus-Christ, ton Fils, notre Seigneur et notre Dieu, qui règne avec toi et le Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles des siècles. »Collecte de la messe du jour (1er dimanche de l’Avent).

Charité envers nos frères

Le ton adopté par Jésus est dramatique ; pourtant, lorsque Paul aborde le même thème, une grande confiance transparaît dans sa lettre. Les Thessaloniciens savent déjà « comment se conduire pour plaire à Dieu » (1 Th 4, 1) ; Paul est comme un père qui voit ses enfants déjà bien avancés dans le droit chemin, et qui en reçoit une grande satisfaction, remettant au Seigneur les préoccupations qui pouvaient l’assaillir. Pour devenir saints et se préparer à recevoir le Seigneur, pendant et à la fin de nos vies, il faut grandir en charité : « Que le Seigneur vous donne, entre vous et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant. » (1 Th 3, 12)

Il ne s’agit pas seulement de bienveillance et de gentillesse ordinaires à l’égard de ceux qui nous entourent. Il s’agit d’aimer, comme Dieu, tous les hommes de manière intense et débordante. Même si c’est Dieu qui justifie l’homme et le purifie pour le rendre digne de lui, il nous est instamment demandé de faire de « nouveaux progrès », de laisser l’Esprit s’emparer de notre vie pour y faire régner la charité du Christ. L’Avent, comme le Carême, est un temps de conversion. Nous pouvons, au cours de ce mois, nous fixer des objectifs concrets et ambitieux pour aimer plus généreusement et au-delà de notre cercle habituel. L’Esprit saura saisir l’opportunité pour nous sanctifier.

N’oublions pas qu’une des plus excellentes formes de la charité est d’attirer notre prochain vers le Christ. L’Avent est une marche vers la lumière qui nous arrache aux ténèbres, comment pourrions-nous laisser les autres hommes errer dans leurs prisons intérieures ? Le cardinal Ratzinger complétait ainsi sa description de l’Avent :

« Courir à sa rencontre, vigilants, comme des hommes qui ne permettent pas que s’éloigne encore plus de leurs oreilles et de leurs cœurs ce que les apparences de ce monde veulent continuellement nous faire oublier : que c’est lui le véritable centre, qu’il est au milieu de nous. Vivre conformément à l’Avent signifie vivre comme quelqu’un qui est sorti du sommeil, et cela comporte alors également la responsabilité de veiller, de tirer les autres du sommeil, de montrer aux autres ce qui donne de l’importance à notre vie, car elle représente ce qui est véritablement important. »J. Ratzinger, Enseigner et apprendre l’amour de Dieu, op. cit., p. 144.

C’est ainsi, par la vigilance et la charité, que notre cœur se préparera à la venue du Christ ; son retour dans la gloire deviendra peu à peu l’horizon habituel de nos pensées et préoccupations, notre cœur y trouvera son aspiration profonde. Reprenons cette prière de dom Guéranger comme une réponse spirituelle aux avertissements de l’évangile :

« Nous devons donc nous attendre à voir éclater tout à coup votre Avènement terrible, ô Jésus ! Bientôt, vous allez venir dans votre miséricorde pour couvrir notre nudité, comme un vêtement de gloire et d’immortalité ; mais vous reviendrez un jour, et avec une si effrayante majesté que les hommes en sécheront de frayeur. Ô Christ ! ne me perdez pas, en ce jour de l’embrasement universel. Visitez-moi auparavant dans votre amour : je veux vous préparer mon âme. Je veux que vous preniez naissance en elle, afin qu’au jour où les convulsions de la nature annonceront votre approche, je puisse lever la tête, comme vos fidèles disciples, qui, vous portant déjà dans leurs cœurs, ne craindront rien de vos foudres. »Dom Guéranger, L’année liturgique, chap. 2 « Mystique de l’Avent », op. cit., p. 125.

Contemplation avec Marie

« Je ferai germer pour David un Germe de justice » (Jr 33, 15) : Jérémie reprend les promesses messianiques de la lignée de David (cf. 2 Sam 7), il contemple ce « germe » (צמח, tsemak), qui désigne la venue d’un héritier du trône. La maison royale de Juda n’est pas abandonnée à la stérilité : « Un rejeton sortira de la souche de Jessé, un surgeon poussera de ses racines. » (Is 11, 1)

L’image est particulièrement frappante pour ce temps de l’Avent, alors que Marie est enceinte de Jésus, lui-même « Fils de David », qui vient accomplir ces promesses. Caché en son sein depuis l’Annonciation, le Germe est en train de grandir ; elle le sent et l’attend avec amour, comme toutes les mères qui posent avec tendresse la main sur leur ventre qui grossit.

Marie est elle-même image de l’Église : elle nous engendre aujourd’hui à la vie dans le Christ, mais cette vie est encore cachée comme celle de l’embryon ; notre véritable naissance sera l’entrée au Ciel : « Ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. Nous le savons : quand cela sera manifesté, nous lui serons semblables car nous le verrons tel qu’il est. » (1 Jn 3, 2) C’est ainsi que saint Paul VI recommandait la dévotion mariale pendant cette période :

« Les fidèles qui, avec la liturgie, vivent l’esprit de l’Avent, en considérant l’amour ineffable avec lequel la Vierge Mère attendait le Fils, seront amenés à la prendre comme modèle et à se préparer à aller à la rencontre du Sauveur qui vient, “vigilants dans la prière et remplis d’allégresse”. Nous voulons faire observer également que la liturgie de l’Avent, en unissant l’attente messianique et l’attente du retour glorieux du Christ avec la mémoire pleine d’admiration de sa Mère, présente un heureux équilibre cultuel qui peut être pris comme règle pour empêcher toute tendance à séparer – comme il est arrivé parfois dans certaines formes de piété populaire – le culte de la Vierge de son point de référence indispensable : le Christ. Il en résulte que cette période, comme l’ont fait observer les liturgistes, doit être considérée comme un moment particulièrement adapté au culte de la Mère du Seigneur ; nous confirmons cette orientation et souhaitons que partout, on l’accueille et la suive. »

Imitons donc Marie en ce temps de l’Avent, en prenant plus de temps pour la contemplation et l’attente amoureuse. Pour cela, nous pouvons reprendre cette belle prière à Marie de Mgr Tonino Bello, prélat italien en voie de béatification :

« Sainte Marie, Vierge de l’attente, donne-nous de Ton huile, parce que nos lampes s’éteignent. Vois, nos réserves se sont consumées. Ne nous envoie pas chez d’autres marchands. Allume à nouveau dans nos âmes les anciennes ardeurs qui nous brûlaient de l’intérieur, quand il suffisait d’un rien pour nous faire tressaillir de joie : l’arrivée d’un ami lointain, le rouge du soir après l’orage, le crépitement de la bûche qui en hiver surveillait les retours à la maison, le son des cloches carillonnant les jours de fête, l’arrivée des hirondelles au printemps, l’arrondi tendre et mystérieux du ventre maternel, le parfum de lavande qui faisait irruption quand on préparait un berceau. Si aujourd’hui nous ne savons plus attendre, c’est parce que nous sommes à court d’espérance. Ses sources se sont asséchées. Nous souffrons d’une crise profonde du désir. Et, désormais satisfaits des mille succédanés qui nous assaillent, nous risquons de ne plus rien attendre, pas même ces Promesses surnaturelles qui ont été signées avec le Sang du Dieu de l’Alliance.

« Sainte Marie, Femme de l’attente, soulage la douleur des mères souffrant pour leurs fils qui, sortis un jour de la maison, n’y sont jamais revenus, tués dans un accident ou séduits par les appels de la jungle ; dispersés par la fureur de la guerre ou aspirés par le tourbillon des passions ; engloutis par la fureur de l’océan ou bouleversés par les tempêtes de la vie.

« Sainte Marie, Vierge de l’attente, donne-nous une âme de veilleur. Arrivés au seuil du troisième millénaire, nous nous sentons malheureusement plutôt fils du crépuscule que prophètes de l’Avent. Sentinelle du matin, réveille dans nos cœurs la passion de fraîches nouvelles à porter à un monde qui se sent déjà vieux. Apporte-nous enfin la harpe et la cithare, afin qu’avec Toi, matinale, nous puissions réveiller l’aurore. Face aux changements qui secouent l’histoire, donne-nous de sentir sur notre peau les frissons des commencements. Fais-nous comprendre qu’il ne suffit pas d’accueillir, il faut attendre. Accueillir est parfois un signe de résignation. Attendre est toujours un signe d’espérance. Rends-nous pour cela ministres de l’attente. Quand le Seigneur viendra, ô Vierge de l’Avent, qu’il nous surprenne, grâce à Ta complicité maternelle, la lampe à la main. Ainsi soit-il. »T. Bello, Marie, femme de nos jours, Mediaspaul, 1998, p. 25.


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  • L’entrée à Jérusalem (chapelle du Palais, Palerme)